Publié le 30 Juin

Isabelle Portail, une vie en 3 dimensions

Découvrez le portrait d’Isabelle Portail, enseignante en production 3D, infographiste freelance et fondatrice de la structure auvergnate 3D Graphic. Cette passionnée de 3D a accepté de nous livrer son parcours, de nous exposer son approche métier ainsi que ses conseils pour les étudiants intéressés par ce domaine.



Petite auvergnate deviendra grande

Née dans une petite ville en Auvergne, à Ambert, Isabelle s’y sent à l’étroit. Elle rêve d’une vie d’une autre dimension. Elle souhaite vibrer au rythme des grandes villes et voyager. Très tôt, elle trouve sa vocation : « Je crois que je devais avoir 16 ans. J’étais devant le JT. Il y avait la présentation du film Tron – un film de science-fiction du réalisateur Silven Lisberger – qui retrace l’histoire d’un concepteur de jeux vidéo. J’ai été scotchée par l’esthétique, par l’univers. Je me suis dit : Isabelle c’est ça que tu vas faire, travailler l’image. »



Isabelle n’a cependant pas l’argent pour financer ses études en imagerie 3D. « Quand j’étais étudiante, il n’existait que peu de formations, très couteuses » nous précise-t-elle. Elle cherche donc un emploi sans réel lien avec ses ambitions et obtient un contrat en or de responsable des ventes internationales chez un créateur de mode parisien. L’objectif de vie citadine est rempli, mais l’animation dans tout ça ?

Le cœur la rappelle à ses rêves d’adolescente. Elle décide de tout quitter. Son ambition c’est la 3D ! Pour amorcer ce changement, en 1990 elle fait des études dans la réalisation de maquette à l’Asfodess, le seul organisme de l’époque à proposer ce type de formation. Les choses commencent à prendre forme. Isabelle débute en qualité de maquettiste pour différents bureaux d’architectes. Elle travaille sur des projets pour le célèbre Musée de l’Air et de l’Espace du Bourget au nom de la société New-tone. La modélisation est désormais au cœur de son métier. Elle travaille même dans la pub et les effets spéciaux pour le cinéma.



De grandes écoles et de belles rencontres

Forte de son expérience terrain, Isabelle complète son parcours en intégrant des écoles de production d’images. En 1993, elle passe par l’Institut International de l’Image et du Son à Trappes et travaille en production 3D. Puis, en 2004, elle intègre l’école des Gobelins à Paris, son rêve d’étudiante. Sa formation en poche, de nouvelles opportunités pointent le bout de leur nez. Elle travaille sur des séries pour la télévision Belge, Luxembourgeoise et Arte.



De retour en France en 1996, elle travaille, au sein de la société Gribouille, sur des pilotes de films et des animations pour la Cité des Sciences.

Tous les ans, elle se rend au Festival international du film d’animation d’Annecy où elle rencontre les grands de ce monde comme le responsable animation de Dreamworks, Kristof Serrand, ou encore la responsable des ressources humaines de Disney, Paméla Focht.


Donner aux jeunes la possibilité de se former à la 3D gratuitement

À la fin de la trentaine, Isabelle souhaite se tourner vers l’enseignement. Ce choix est motivé par deux constats : « Le rythme et les déplacements inhérents au métier d’infographiste 3D n’étaient plus compatibles avec ma vie de famille » nous confie-t-elle. « Je souhaitais donner aux jeunes, l’opportunité que j’aurais voulu recevoir à leur âge : pouvoir me former par l’enseignement public au domaine de la 3D. »

Isabelle dispose de qualités de pédagogue et sa passion pour son métier n’est plus à démontrer, ce choix de carrière se met donc en place assez naturellement. D’abord responsable du secteur 3D dans un centre de formation à Paris, Isabelle devient ensuite enseignante à l’ESMA de Montpellier.

Après avoir foulé du pied et de l’esprit les grandes villes d’Europe, Isabelle retourne sur les terres qui l’ont vu naître, le pays d’Auvergne, pour transmettre aux étudiants son expertise acquise en modélisation. Elle enseigne d’abord dans plusieurs écoles à Clermont-Ferrand, avant d’obtenir le poste qu’elle occupe aujourd’hui : enseignante de production 3D au sein du département informatique graphique de l’IUT du Puy-en-Velay.

Isabelle n’en reste pas moins ouverte au monde. De 2012 à 2018, grâce à un partenariat entre le département informatique et le campus universitaire chinois Tellhow, elle dispense à huit reprises ses cours à Nanchang.


La 3D… en long, en large et en travers

« La 3D, c’est une addiction. Plus on apprend, plus c’est simple d’apprendre car les logiciels disposent à peu près tous de la même mécanique. Alors on ne s’arrête plus ! » s’enthousiasme Isabelle. AutoCad, Charly Robot, Softimage, GabynCartoon, 3DS Max, Maya, Character Studio, Xsens ou encore Photoshop, Illustrator, Substance Painter, After effect, Premiere pro,  et tant d’autres… Isabelle reste en alerte de tous les logiciels qui lui permettent de travailler les différents aspects de la modélisation : morphing, texturing, motion capture, montage, etc.

Curieuse et consciente d’exercer dans un domaine en constante évolution, elle reste en alerte des nouveautés et tient à jour ses connaissances. En ce moment, Isabelle explore les possibilités techniques proposées par Unreal Engine, un moteur de jeu 3D. « Le système blueprint du logiciel est une belle révolution, il facilite la prise en main de la partie programmation » nous précise-t-elle.



Mais l’outil ne fait pas le maître ! « Le logiciel est le moyen. Sans idée, sans imaginaire, sans ouverture artistique à la sculpture, à la peinture, au dessin… ce métier n’aurait pas vraiment de sens » nous alerte-elle. « L’animation demande également des compétences d’écriture, qui vont être différentes selon que l’on travaille sur un projet où le destinataire est spectateur (comme le cinéma, la pub,…) ou sur un projet où l’utilisateur est en interaction avec le jeu, voire en immersion, comme en réalité virtuelle ou réalité augmentée. »


Femmes et hommes créatifs… Croyez en vous ! La 3D vous attend !

« Le plus important, c’est d’avoir de grands rêves et d’agir pour les réaliser » se laisse philosopher Isabelle. Pour travailler dans ce métier, il faut être passionné et pugnace. « Les écoles au budget accessible sont trop peu nombreuses. » Le parcours peut être long et tortueux mais il faut s’accrocher. « Il ne faut pas avoir peur de travailler sans compter. Il faut être curieux, passionné par ce que l’on fait et, je ne le dirai jamais assez, il faut avoir l’esprit CRÉ-A-TIF ! »

« Dans ce métier, les femmes sont très peu représentées » se désole Isabelle. « J’encourage toutes celles et ceux, qui disposent des qualités humaines requises, à se lancer dans cette belle aventure. » L’imagerie 3D est en pleine expansion et se retrouve dans tous les domaines : l’industrie, la médecine, l’architecture, les jeux, la pédagogie, la culture, l’archéologie, le tourisme, la communication, etc. On ne compte plus les déclinaisons possibles. C’est un métier d’avenir et ce serait dommage de s’en priver !

Comme le dirait son premier maître à penser, Yoda : « Que la force soit avec vous ! »


Rédacteurs : Damien Rochegude, Alan Salaün, Pierre Vandel, étudiants en première année de DUT Informatique Graphique.